Lundi débutaient les WTA finals 2022 à Fort Worth (Texas). Une édition atypique qui a notamment vu la première participation notre championne Ons Jabeur, à la faveur de sa deuxième place mondiale. Ettachkila décrypte pour vous cet événement majeur et historique pour le sport tunisien.
Les WTA finals c’est quoi ?
Ce tournoi met aux prises les 8 meilleures joueuses de l’année selon le classement Race de la WTA. Elles s’affrontent dans un format appelé « round robin », qui consiste en deux poules de 4 joueuses qui jouent pour briguer les deux premières places et se qualifier aux demi-finales. Les joueuses se battent toute l’année pour décrocher des places de prestige pour cet événement phare de la saison tennis, en témoigne la joie de de Maria Sakkari il y a dix jours en quart de finale du WTA 1000 de Guadalajara lorsqu’elle a validé son billet face à sa concurrente directe Kudermetova. Beaucoup considèrent, officieusement, ce tournoi comme le cinquième grand chelem de l’année.
Un peu d’histoire
La première édition a eu lieu en 1972 en Floride, avec une dotation inédite pour l’époque de 100 000 dollars, et a été remportée par Chris Evert alors âgée de 17 ans, qui ne touchera d’ailleurs pas son chèque car considérée comme amateur. Jusqu’en 1986, le tournoi avait lieu à la mi-saison, en mars, avant que la WTA ne déplace le tournoi en novembre. Après cette première édition, le tournoi se joue pendant presque 30 ans aux Etats-Unis, et notamment pendant 21 ans au Madison Square Garden de New York (de 1979 à 2000). Depuis, le tournoi a fait le tour du monde, de Munich à Singapour, en passant par Madrid, Doha et Istanbul..
En termes de palmarès, c’est Martina Navratilova qui détient le record du nombre de victoires avec 8 titres, suivie par Serena Williams et Steffi Graff avec 5 titres. Quatre joueuses ont déjà remporté le tournoi sans n’avoir jamais remporté de Grand Chelem, dont trois récentes lauréates, à savoir Radwanska (2015), Cibulkova (2016) et Svitolina (2018).
Autre particularité de ce tournoi : de 1984 à 1998 la finale se jouait en 5 sets, une première (et dernière) dans le tennis féminin (en tout cas au XXème et XXIème siècle). Pendant ces 14 années, 5 sets ont effectivement été disputés à trois reprises, en 1990 (Monica Seles), 1995 et 1996 (Steffi Graf).
Points WTA et Prize Money
Les WTA Finals c’est aussi une occasion de prendre encore plus le large au niveau du classement WTA pour le top 8 avec 125 points par match joué et 125 points additionnels par victoire en match de poule. Une victoire en demi-finale rapporte 330 points et la lauréate se verra créditer de 420 points supplémentaires. Au total, 1 500 points WTA peuvent être obtenus au total sur le tournoi.
En ce qui concerne les prize money, on est bien loin des 100 000 dollars de 1972, avec une dotation de 5 millions de dollars cette année. Chaque joueuse se verra attribuer 110 000 dollars, plus 110 000 dollars pour chaque victoire en poule. Une qualification en demi-finale rapporte 30 000 dollars supplémentaires, un passage en finale 420 000 dollars et la gagnante empochera encore 820 000 dollars de plus. Au maximum, une joueuse peut empocher la coquette somme de 1,7 million de dollars.
Quid de l’édition 2022
Cette année les 8 joueuses qualifiés pour les Finals ont été réparties dans les deux poules suivantes :
Tracy Austin Group
1. Iga Swiatek
4. Coco Gauff
6. Caroline Garcia
8. Daria Kasatkina
Nancy Richey Group
2. Ons Jabeur
3. Jessica Pegula
5. Maria Sakkari
7. Aryna Sabalenka
Une des particularités de cette édition (qui comprend 4 néophytes : Jabeur, Pegula, Gauff et Kasatkina) est qu’il sacrera une lauréate inédite; quoiqu’il arrive, ce sera une première pour celle qui remportera le tournoi. Les 4 autres joueuses disputent, quant à elles, leurs deuxièmes WTA finals. Un moment particulier donc pour toutes les joueuses, et aucune d’entre elles ne peut se reposer sur son expérience de l’événement.
Focus sur les participantes :
Iga Swiatek
Numéro 1 mondiale et véritable patronne du circuit depuis la retraite d’Ashley Barty, la polonaise de 21 ans, forte de ses 8 titres cette saison dont 2 grand chelems (Roland Garros et USOpen), fait figure d’immense favorite pour le titre. Avec 64 victoires pour seulement 8 défaites cette saison, elle a été littéralement injouable et arrive à Fort Worth en pleine forme avec un titre à San Diego glané il y a deux semaines, et une finale à Ostrava la semaine précédente
Ons Jabeur
Forte de sa deuxième place mondiale, la tunisienne s’invite à ses premiers WTA Finals par la grande porte. Qualifiée haut la main (depuis septembre), elle sort d’une saison exceptionnelle avec notamment deux titres à Madrid (WTA 1000) et Berlin (WTA 500) mais également deux finales de grand chelem à Londres et New York. Avec 46 victoires pour 15 défaites, elle est indiscutablement la deuxième joueuse la plus en forme de la saison 2022. Seul bémol pour la tunisienne, elle n’a joué que trois matchs depuis sa finale perdue à l’US Open en septembre, avec deux victoires expéditives et sans rythme, et une défaite terriblement frustrante, à domicile, à Monastir, contre Claire Liu (73èmemondiale). Un manque de rythme qui pourra porter préjudice à notre Ministre du bonheur.
Jessica Pegula
L’américaine est sans aucun doute l’une des révélations de la saison, avec un bond de 15 places pour passer de la 18ème à la 3ème place mondiale. Elle sera également une des filles en forme de cette fin de saison, elle qui sort tout juste d’un titre (son premier cette année) au WTA 1000 de Guadalajara la semaine passée. Avec 42 victoires pour 18 défaites et 3 quarts de finale de GC, l’américaine réalise la meilleure saison de sa carrière, à 28 ans, et sera une concurrente sérieuse pour le titre à Fort Worth, pour sa première participation aux WTA Finals.
Coco Gauff
La jeune prodige américaine se qualifie, à seulement 18 ans, pour ses premiers WTA finals après une saison durant laquelle elle n’a fait que confirmer sa progression fulgurante depuis son entrée dans le Top 100 en 2019 (alors qu’elle n’avait que 15 ans). Finaliste à Roland Garros, quart de finaliste à l’US Open, Gauff aura été très régulière cette saison mais sans pour autant parvenir à remporter de titres. Hormis Roland Garros, elle n’a d’ailleurs atteint que deux demi-finales, en WTA250 (à Adelaide en janvier et à Berlin en juin). Elle arrive au Texas avec des matchs dans les jambes après avoir joué San Diego et Guadalajara, mais avec un bilan mitigé et deux quarts de finale perdus, dont notamment une lourde défaite (6/0 6/3) face à Swiatek à San Diego. C’est sans aucun doute la première d’une longue série de participation aux WTA Finals pour la toute jeune américaine, qui viendra engranger de l’expérience et tenter de jouer les trouble-fêtes au Texas.
Maria Sakkari
La grecque s’est qualifiée dans la douleur pour cet événement, en battant Kudermetova en quart de finale à Guadalajara, à 10 jours à peine des WTA Finals. Une saison en deçà des attentes pour Maria, sans aucun titre à son actif et sans avoir réussi à atteindre ne serait-ce que les quarts de finale d’un des tournois du grand chelem. Une saison qui contraste avec la précédente, durant laquelle la grecque avait remporté son premier titre en carrière, joué deux demi-finales de grand chelem, intégré le top 10 mondial en allant chercher la 6ème place et fini sur une première participation exceptionnelle aux WTA finals en atteignant les demi-finales (victoires notamment devant Swiatek et Sabalenka, alors tête de série 1 et grande favorite). Une saison décevante donc pour Sakkari, qui aura à cœur de finir sur une note positive mais n’a à priori pas assez de matchs références pour briller sur un format pareil. Nous fera-t-elle démentir ?
Caroline Garcia
La française de 29 ans, qui sera d’ailleurs la « doyenne » de cette édition, s’est qualifiée aux WTA Finals après une saison époustouflante et un come-back au plus haut niveau après un passage à vide depuis 2018 où elle avait atteint la 4ème place mondiale. Garcia réalise la plus belle progression de l’année 2022 en passant de la 74ème à la 6ème place mondiale. Caro cette saison c’est 3 titres, 41 victoires pour 19 défaites, et un été phénoménal durant lequel elle a notamment enchainé un titre au masters 1000 de Cincinnati et une demi-finale à l’US Open (défaite contre Ons). La française détient notamment le pourcentage de jeux de service gagnés le plus haut du circuit, avec plus de 80% de jeux de service gagnés cette année (ce qui est absolument énorme). Tout comme pour Ons, c’est un peu plus compliqué pour la française depuis l’US Open, avec deux défaites au premier tour à Tokyo et San Diego, et une défaite au 2ème tour contre Stephens à Guadalajara (après avoir très difficilement battu une qualifiée au premier tour). À sa fin de saison est venue s’ajouter sa séparation, il y a quelques jours, avec son coach et l’architecte de sa renaissance, Bertrand Perret, dans des conditions et pour des raisons assez floues. Le défi sera donc de se remobiliser et retrouver son niveau estival, malgré la période difficile qu’elle traverse. Pas évident.
Aryna Sabalenka
À l’instar de Maria Sakkari, c’est une saison compliquée qui se termine pour la Biélorusse après une saison 2021 époustouflante symbolisée par une 2ème place mondiale atteinte, deux titres (Abu Dhabi et Madrid), et deux demi-finales de GC. En 2022 Aryna a un maigre bilan de 30 victoires pour 20 défaites (le ratio le plus faible des 8 participantes) et 5 places perdues au classement. Elle sauve néanmoins quelque peu sa saison sur sa tournée américaine, avec des demi-finales aux masters de Cincinnati et à l’US Open, ce qui lui permet d’accrocher une place in extremis pour Fort Worth.
Daria Kasatkina
La russe de 25 ans, qui comme Caro Garcia avait lâché prise depuis 2018 et sa 10ème place mondiale, fait un joli come-back en cette saison 2022. Elle intègre en effet de nouveau le Top 10, en arrachant même le meilleur classement de sa carrière ce mois-ci avec une 8ème place mondiale qui lui permet de valider de justesse son billet pour ses premiers WTA Finals. Avec deux titres et une demi-finale à Roland Garros, elle passe la barre des 40 victoires cette saison pour 20 défaites. Une des particularités de la Russe est sa qualité de retour de service, avec 48% de jeux de retour gagnés, le meilleur pourcentage après Swiatek, qu’elle dépasse même sur le pourcentage de points gagnés sur première balle adverse. Comme Jabeur et Garcia, la fin de saison a été laborieuse, mais la confiance engrangée durant la saison devrait lui permettre de réaliser un bon tournoi.
Tout cela nous promet donc plein de belles choses cette semaine au Texas, et une fin de saison en apothéose, nous l’espérons, pour notre championne Ons Jabeur.
Mhamed Ben Salah