[BLOG] La Conquête des Aghlabides. «El Chabiba» sur le toit de la Tunisie en 1977

Au cours de la saison 1976-1977, la Jeunesse Sportive de Kairouan a créé la surprise en s'adjugeant le titre de champion au nez et à la barbe des membres du BIG4 et deviendra, sans conteste, le champion le moins attendu de l'histoire du football tunisien.

Le retour de tous les augures en « Nationale »

En 1975, la JSK retrouvait la Ligue Professionnelle 1. Hamda Laouani, ex-président de club kairouanais (dont le stade où évolue actuellement le club porte le nom), décide, dans la continuité de la longue tradition d’entraîneurs des pays de l’Est passés par El Chabiba, de faire confiance au technicien yougoslave Dragan Vasiljevic pour diriger les Aghbalides. L’entraîneur aura à sa disposition une formation rodée avec un noyau dur qui joue ensemble depuis quelques saisons (7 éléments au total) et qui a longtemps fait l’ascenseur entre la « Nationale A » et la division inférieure. Avec une bonne partie des joueurs issus de son académie, le promu pouvait compter sur un vivier local au fort sentiment d’appartenance envers le club.

Ce retour en LP1 sera au final une belle réussite pour les joueurs de la Jeunesse Sportive Kairouanaise, tant d’un point de vue comptable, avec une 5e place au classement, que d’un point de vue structurel (les premières mises au vert qu’a connues le pays étaient instaurées du côté de Kairouan). Le public aghlabide redécouvrira le talent et le réalisme de Moncef Ouada (19 buts) lors de cette saison 1975-1976, ainsi que la technique et la polyvalence de Khemaies Laâbidi, qui sera élu Meilleur Joueur 1976 par le quotidien L’Action, devant l’international du Railway, Ridha El Louze.

1977, Un exercice historique et une fin en apothéose

Les Aghbalides continueront sur leur lancée de la saison passée en comptant sur peu de recrues, un staff confirmé et des dirigeants ambitieux et aux idées claires.

Le «roster» de la Jeunesse Sportive Kairouanaise possédait des joueurs d’expérience, qui ont permis au technicien Dragan Vasiljevic de jouer les troubles-fêtes et de bousculer la hiérarchie quasi-intouchable du BIG4 et des habituels outsiders tels qu le Stade Tunisien ou le Sfax Railways Sports.. Comptant sur une ossature de joueurs du cru, le succès d’El Chabiba était très symbolique pour cette conquête du Lion (le trophée du championnat était représenté par ce félin jusqu’en 1999-2000). Parmi ces éléments, on peut citer le duo Khemais Laâbidi, Moncef Ouada (qui terminera meilleur buteur du championnat avec 18 buts) le milieu de terrain Othman Chehaibi, le gardien Mokhtar Oueslati, Kacem Jabbès ainsi que le défenseur Youssef Seriati.

La formation kairouanaise ne connaîtra que seulement 5 défaites lors de cette saison 1976-1977, et fera preuve de caractère et d’une technique impressionnante tout au long du championnat. El Chabiba allait décrocher le 1e titre de son histoire sous le mandat de Hamda Laouani, trois ans jour pour jour après sa rétrogradation en LP2..

Kairouan, la JSK et le professionnalisme

Avant l’avènement du professionnalisme (ou non-amateurisme) en 1996 par la Fédération Tunisienne de Football, le club de Kairouan réussit quelques exploits, comme en 1993, en terminant vice-champion (derrière l’Espérance de Tunis) et se hissant en finale de la coupe de Tunisie la même année (perdue 2-1 contre l’Étoile ).

Malheureusement, ces dernières années le club est resté en proie à des problèmes économiques et structurels et continue encore à osciller entre la zone de maintien et le ventre-mou du classement de la LP1. Le modèle économique du club est toutefois resté fidèle à celui qui a fait la réussite de la génération des 70’s avec une stratégie de formation (parmi les meilleures du pays) qui fera éclore de nombreux talents qui marqueront le football tunisien et ferons leurs preuves chez les clubs du Big 4 en Tunisie. En l’occurrence, Mourad Okbi, Jamel Tayèche, Fethi Chehaïbi dit Bargou, le regretté Lassaâd Ouertani, Hamdi Kasraoui, Amine Chermiti, Zouhaier Dhaouadi, Ahmed Khalil pour ne citer qu’eux… et l’un des joueurs emblématiques de la sélection : Khaled Badra.

La JSK, ce bastion du football tunisien et club formateur par excellence à l’identité remarquable, peut regarder avec beaucoup d’orgueil son histoire. Mais un regard et une stratégie tournés vers l’avenir s’imposent pour préserver cette grande école désormais à la croisée des chemins.