Exclu : A l’heure d’affronter l’Espagnol Barcelone pour le choc de la Liga 2, Mehdi Nafti se confie…

Arrivé au chevet du Deportivo Lugo, après un très mauvais départ en Liga 2, le jeune technicien tunisien, Mehdi Nafti (41 ans), est entrain de redresser la barre du club "galicien". INTERVIEW

Bonjour Mehdi, racontez nous comment s’est passée votre arrivée chez Lugo ?

Mon arrivée à Lugo s’est passée très vite. Le président Tino Saqués me voulait depuis l’année dernière et nous avons vite trouvé un terrain d’entente. Je savais que je mettais les pieds dans un contexte difficile, après le très mauvais départ du club en segunda division, mais bon, j’etais très bien accueilli par tout le monde : le président, les dirigeants et le staff technique. On m’a rapidement mis dans les meilleures conditions. Avec les joueurs, le contexte était différent, l’équipe venait de perdre plusieurs matchs de suite, mon prédécesseur venait d’être licencié. Au niveau émotionnel, ce n’était donc pas facile pour eux.
J’ai beaucoup travaillé sur le volet mental à mon arrivée. Durant les trois premiers jours, c’était même compliqué de leur faire retrouver le sourire, jusqu’à cette première victoire à Castillon. Le scénario de ce match (Lugo a inscrit l’unique but de la rencontre dans le temps additionnel) a été un soulagement total pour tout le monde, mes joueurs ont retrouvé de bonnes sensations et tout a été beaucoup plus facile par la suite…

En deuxième division, tous les clubs sont préparés et les matchs se jouent sur des détails, mais au-delà des résultats, c’est surtout la manière et l’investissement qui me rendent fier de notre travail.

Comment expliquez-vous cette belle série en championnat depuis votre venue à la tête de cette équipe ?

Je vous avoue que malgré cette belle série de matchs sans défaite, qui nous a permis de prendre 13 points sur 15 (quatre victoires et un match nul en cinq rencontres), je ne me suis jamais focalisé sur le résultat, mais surtout sur la manière. Si on avait eu moins de points au classement, j’aurais également été fier de mes joueurs parce qu’ils montrent un état d’esprit différent sur le terrain. Au fil des matchs, l’équipe grandit et devient très solide. Par exemple, on aurait pu perdre à Castillon ou à Tenerife… On aurait pu également être défaits contre le Rayo Vallecano, mais on a réussi à lutter jusqu’au bout pour grappiller des points. En deuxième division, tous les clubs sont préparés et les matchs se jouent sur des détails, mais au-delà des résultats, c’est surtout la manière et l’investissement qui me rendent fier de notre travail. Après je ne vais pas vous raconter des bêtises, quand on gagne, c’est toujours mieux [sourire].

Comment l’équipe a-t-elle pu adhérer aussi vite à vos idées ?

Il ne faut pas oublier que je suis arrivé dans un contexte où on jouait tous les trois jours, donc si vous voulez, je n’ai pas eu beaucoup de temps pour préparer l’équipe. J’ai commencé à travailler en essayant de revenir à l’essentiel et aux choses basiques. Il fallait arrêter très vite cette hémorragie au niveau des buts encaissés. Du coup, nous avons fait beaucoup de travail tactique et nous avons mis en place une organisation défensive plus efficace. Malheureusement, quand vous jouez tous les trois jours, vous ne pouvez pas tout chambouler [par manque de temps] donc il fallait donner la priorité à l’organisation défensive et le résultat final nous a fait beaucoup de bien..

On prend les matchs comme ils viennent et si on peut déranger un peu les plus grands, on le fera avec plaisir.

Votre équipe est aujourd’hui barragiste, est-ce que vos objectifs ont évolué ou vous jouez toujours pour le maintien ?

Franchement, au jour d’aujourd’hui, le classement est un détail pour nous… On sait qui on est, on connaît nos moyens, on est réaliste et humble, on ne va pas perdre la tête par rapport à ce classement. Notre place actuelle (6e en Liga 2) n’est pas réaliste par rapport à notre budget et notre effectif, mais on est là… On prend les matchs comme ils viennent et si on peut déranger un peu les plus grands, on le fera avec plaisir. Le plus important pour nous à court terme et le cap le plus compliqué à franchir, ce n’est pas le classement, ce ne sont pas les résultats, mais ce sont nos adversaires qui commencent à nous respecter et seront mieux préparés pour nous jouer.
En interne, il est interdit pour nous de regarder le classement dans le vestiaire. Le plus important, c’est d’atteindre l’objectif du maintien le plus tôt possible. Ça fait des années que le club souffre et qu’il se sauve dans les dernières journées. Si on peut avoir une saison un peu plus tranquille que les exercices précédents, cela serait génial pour tout le monde..

Être l’un des premiers tunisiens à pouvoir entraîner à ce niveau est une fierté pour moi, pour ma famille, mais je ne ne pense pas m’arrêter là.

Comment vivez-vous personnellement cette expérience avec Lugo ? (Surtout en étant l’un des premiers tunisiens qui entraînent à ce niveau en Europe )

Vous savez, le métier d’entraîneur est un petit peu «précaire», du coup, je vis cette expérience pleinement. Je n’ai pas le temps de me plaindre car c’est une grande opportunité pour moi et pour mon staff de pouvoir entraîner en deuxième division espagnole. Être l’un des premiers tunisiens à pouvoir entraîner à ce niveau est une fierté pour moi, pour ma famille, mais je ne ne pense pas m’arrêter là. Pour moi, ce n’est pas une fin en soi, j’essaie de faire du bon boulot, de la meilleure manière possible. J’ai toujours envie d’apprendre et j’ai beaucoup d’ambitions, mais je garde les pieds sur terre et j’essaie d’être cohérent dans mes approches et dans mon discours.
Cette expérience, je la vis à fond, parce qu’Espagne il y a des milliers d’entraîneurs qui sont au chômage, moi j’ai la chance d’être dans le top 42. Pour un étranger, ce n’est jamais facile, donc c’est un honneur pour moi, même aussi une grande responsabilité parce que j’ai toujours envie de progresser, d’apprendre. Mon objectif est bien évidemment est d’arriver au premier échelon, mais j’ai encore beaucoup de boulot devant moi…

Votre prochain match face à l’Espagnol Barcelone sera un grand test pour vous et pour votre équipe ?

Absolument, l’Espagnol Barcelone est un club programmé pour retrouver la liga dès cette saison. Ils ont d’énormes moyens financiers. Sur le volet sportif, ils n’ont perdu qu’un seul match [face au Rayo Vallecano] et ont encaissé un seul but [en 10 rencontres]. Ils possèdent un grand effectif avec beaucoup de joueurs d’expériences. Pour nous, c’est un match bonus, notre championnat se joue plutôt contre des adversaires de notre calibre, comme Albacete ou Alcorcon.. mais nous voulons jouer crânement notre chance car c’est le genre de rencontres pour lesquelles mes joueurs seront très motivés…