Karim Haggui : Le Guerrier Tranquille (2/2)

L'attachant et charismatique international tunisien s'est toujours naturellement imposé comme un véritable patron dans toutes les équipes où il a joué, grâce à ses qualités sur et en dehors des terrains.. Retour dans ce deuxième épisode sur sa grande carrière avec les Aigles de Carthage depuis ses débuts avec les jeunes, en passant par l'inoubliable sacre de 2004.

Comme pour ses différentes expériences en club, la carrière internationale du « gendre idéal » Karim Haggui, fût tout aussi riche et mouvementée.. Le natif de Kasserine y fera également valoir son talent, son leadership et sa sérénité.

Débuts en sélection de jeunes

On pourra toujours réécrire l’histoire, et « affirmer » que l’aventure de Karim Haggui avec la Tunisie a « réellement » commencé le 11 février 2004, après son dernier pénalty salvateur face aux Super Eagles du Nigeria, synonyme de qualification historique en finale de la CAN …mais l’histoire de Karim avec la Sélection se lit plus tôt, depuis qu’il a commencé à gravir les échelons dans les catégories de jeunes..

Tout a d’abord commencé à Kasserine, avec la sélection régionale des jeunes, sous la houlette de Hédi Bajeyya et en compagnie de son acolyte et compagnon de toujours, l’excellent attaquant Sabeur Trabelsi. Son arrivée au centre de formation de l’Etoile du Sahel, ouvrira les portes de la sélection nationale des jeunes au petit Karim qui y fera ainsi toutes ses classes. Son aventure commença en 99-2000, chez les U16 de la Tunisie, avec un staff composé par Abdelmajid Goubantini, Hammadi Bousarsar, Karim Zouaghi et Béchri Hajri. Il passe ensuite chez les U18, entre 2001 et 2002, sous la direction de Skander Kasri, Boubaker Hannachi et Karim Zouaghi, pour arriver enfin en sélection « Espoirs » U21 qui disputera les Jeux Olympiques à Athènes en 2004, avec à sa tête Kemaies Laabidi et Nabil Mâaloul

Durant toutes ses années passées avec les jeunes de la Tunisie, Karim Haggui a côtoyé bon nombre de futurs internationaux A. De la génération-1984, nous pouvons citer le gardien Aymen Balbouli (ESS) , Issam Jemaa (EST) , Amine Letifi (EST) , Khaled Melliti (ESS), Mouâwya Kadri (CSS) Wissam Yahia (CA) ou la génération-1983, Houcine Ragued (PSG), Karim Saidi (CA), Jamel Rhouma (CA) et Hamdi Jabnoun (ESZ) …

L’envol avec les Aigles de Carthage en 2004

Ses belles performances avec la sélection olympique ont tapé dans l’œil du grand Roger Lemerre, alors sélectionneur de l’équipe A. à l’orée de la CAN 2004, que la Tunisie s’apprêtait à organiser, il fera appel à lui pour la première fois à seulement quelques mois de ce grand événement. C’est le 2 août 2003, dans le cadre d’un match amical face à la Guinée, que Karim Haggui fêtera sa première sélection avec les aigles de Carthage (Il avait remplacé Kais Zouaghi à la 81e minute de jeu). Quelques semaines plus tard, le 10 Septembre 2003, face à la Cote-d’Ivoire, il connaîtra sa première titularisation avec la Tunisie, et sera aligné dans l’axe de la défense aux côtés de l’expérimenté Radhi Jaidi.

13 Janvier 2004, le technicien français, grand éducateur et militaire de formation, Roger Lemerre, dévoile sa liste des 22 soldats qui représenteront la Tunisie à la CAN 2004. Le gamin de Kasserine n’en croyait pas ses oreilles : il fera partie du régiment et pourra réaliser un premier rêve à 19 ans : disputer une Coupe d’Afrique des Nations, qui plus est, sur ses terres et devant son public …

« Je faisais partie des cinq joueurs de l’équipe olympique ayant été retenus dans la liste élargie de la Sélection A pour la CAN 2004. Moi et Ali Zitouni avons tout donné… Après une préparation et des stages d’une extrême intensité, l’heure des choix était arrivée. Roger Lemerre n’y est pas allé par quatre chemins : il a réuni l’ensemble des 30 joueurs dans la salle d’un hôtel et a commencé à annoncer les noms des joueurs retenus pour la CAN. Je n’espérais pas vraiment faire partie de la liste finale, mais à ma grande surprise j’étais retenu ».

Karim Haggui à propos de sa sélection à la CAN 2004 sur Radio Mosaique FM

Karim Haggui réalisera alors une compétition en tout point remarquable, se montrant volontaire, serviable, courageux et polyvalent. Ce beau bébé (1m90), sorti du chapeau du technicien français Roger Lemerre, lui a bien rendu cette confiance. Il s’est comporté comme un vieux briscard durant tous les matchs, où il suppléera à merveille le latéral Hatem Trabelsi sur le couloir droit, et remplacera dans l’axe, et toujours avec le même brio, le capitaine Khaled Badra, suspendu pour la finale face au Maroc. Les 12 millions de tunisiens, pour qui le temps s’était arrêté lors du dernier penalty face au Nigeria en demi-finale (1-1, 5-3 aux TAB), se souviennent encore de sa joie contenue sur le moment, comme s’il ne réalisait pas encore qu’il avait qualifié le pays pour la finale du tournoi.

Dans un témoignage fort et poignant sur l’arrivée de Karim Haggui en sélection, Radhi Jaidi nous déclarait « J’ai vu en lui toutes les qualités d’un leader à mes cotés en sélection nationale. Il s’est très bien intégré dans le groupe en 2004, il avait un état d’esprit très positif et était à l’écoute. Par la suite, je pense que son expérience en Allemagne, lui a permis de développer davantage ses capacités tactiques et sa discipline. J’aime beaucoup son énergie et sa persévérance pour atteindre ses objectifs, il est très intelligent et s’est toujours montré très mature par rapport à son jeune âge. »

Une belle carrière internationale

Sacré champion d’Afrique avec la Tunisie, le garçon d’à peine vingt piges, qui apprenait encore les b.a.-ba du football sous les ordres de son premier coach Chefaaii Bennani, il y a encore quelques années, est sur un petit nuage. Sa participation aux JO d’Athènes en 2004, quelques mois plus tard, avec ses amis de toujours (Ali Zitouni, Wissam Yahia, Houcine Ragued, Saber Trabelsi …), a permis à la Tunisie de faire bonne figure dans un groupe composé de l’Argentine, la Serbie et l’Australie. (La Tunisie finira 3e et sera éliminée à la différence de buts avec l’Australie).

Karim Haggui s’installera durant dix ans au sein de la sélection tunisienne, s’imposant comme l’un des piliers de la défense. Il dispute un total de 82 matchs pour 5 buts (il a inscrit sa première réalisation le 14 Janvier 2004 à Djerba face au Bénin en amical). De tous ses buts, on se souviendra notamment de sa tête rageuse en quart de finale de la CAN 2006 face au Nigeria (1-1 et élimination 7-6 aux TAB). Haggui participera à 5 Coupes d’Afrique des nations (2004, 2006, 2008, 2010 et 2012) et, point d’orgue de sa carrière internationale, à une Coupe du Monde en 2006.

Mais son passage à l’EN n’a pas toujours été idyllique, à Karim de connaître également des moments plus compliqués. La grande désillusion de 2010, après ce match perdu à l’Estadio de Machava face au Mozambique (1-0), qui a vu s’évaporer les derniers espoirs de la Tunisie de jouer le Mondial en Afrique du Sud, et surtout son dernier match face au Cameroun de Samuel Eto’o en 2013 (match qualificatif à la CdM Brésil 2014 ayant vu la Tunisie se faire sèchement battre à Douala 4-1), constitueront de grandes déceptions collectives et individuelles…

Le 23 mars 2019, Karim Haggui organisera un jubilé haut de gamme et chargé d’émotions au stade olympique de Sousse, entouré de sa famille et de ses coéquipiers de la génération 2004 pour un amical contre une équipe de « All-Stars » africains et européens tels que les Noureddine Naybet, Essam El Hadary, Mohamed Zidan, Hosam Ghaly, Ahmed Hassan, El Hadj Diouf, Nwankwo Kanu, Stefan Kiessling… Les recettes de ce match de gala seront, en signe de reconnaissance à son club formateur, reversées au centre de formation de l’AS Kasserine…La boucle est bouclée, les larmes contenues après la délivrance du dernier penalty face au Nigeria en 2004 peuvent maintenant couler… Le rideau vient de tomber sur une belle carrière…

Karim Haggui peut être fier de tout ce qu’il a accompli avec les Aigles de Carthage, il a toujours honoré le maillot de la sélection et crânement défendu ses couleurs en montrant de grandes qualités techniques et morales. Le natif de la belle ville du Mont-Chambi, El Kasserine, fait clairement partie des jeunes légendes de la Tunisie. Il a mérité son repos du « Guerrier Tranquille…“

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