Tennis, Ons Jabeur : 2021, rêvons plus grand..

La saison 2020 d'Ons Jabeur a été exceptionnelle à tout point de vue. On retiendra surtout son bond de 50 places au classement WTA pour finir au 31e rang mondial (30e même en ce début d'année, de loin son meilleur classement). Ettachkila vous propose cet overwiew sur les statistiques, les axes d'amélioration et les perspectives de notre championne pour cette nouvelle année charnière...

Un pourcentage de victoire digne d’une top 15 ! 

Ons a disputé 36 matchs en 2020 (sans compter les deux matchs de qualifications en début d’année à Hobart). Sur ces 36 matchs elle en a remporté 25, pour un pourcentage de victoire avoisinant les 70%, un score qui correspond à la moyenne des joueuses du top 15. À titre de comparaison, les joueuses du top 30 sont en moyenne à 65% de victoires. Lorsqu’on analyse ces victoires de plus près, on voit qu’Ons a été remarquable contre les joueuses du top 50 (61% de victoires) et a fait jeu égal avec les joueuses du top 15 mondial, face auxquelles elle a remporté 50% de ses confrontations. 

Une des particularités de Ons cette saison a été sa capacité à être intraitable face aux joueuses moins bien classées, avec 80% de victoires. À titre de comparaison les joueuses du top 10 remportent en moyenne moins de 75% de leurs matchs contre des joueuses moins bien classées. En termes de performances, Ons a également été exemplaire contre des joueuses mieux classées qu’elle, avec 56% de victoires contre 38% en moyenne pour les joueuses du top 30. Rappelons tout de même qu’elle a commencé la saison à la 81^ème place mondiale ce qui doit nous faire relativiser quelque peu ces comparaisons, mais n’enlève rien au fait que son classement ne soit pas dû au hasard.

Apprendre à conclure, tel doit être le nouveau leitmotiv de Jabeur

Lorsqu’on s’intéresse plus en détail aux matchs de Ons, on voit qu’elle a disputé 13 matchs en 3 sets, pour un pourcentage de victoire de plus de 61%. Encore une statistique qu’elle partage avec les joueuses du top 20. Les joueuses du top 10 sont quant à elles bien meilleures dans cet exercice avec 74% de victoires en moyenne. Si Ons est sur des bases de top 10 en ce qui concerne les matchs durant lesquels elle perd le premier set, en remportant 36% de ses matchs par la suite (32% pour le top 20), une première défaillance apparaît lorsqu’on s’intéresse aux rencontres dans lesquelles elle remporte le premier set. En effet, les joueuses du top 30 arrivent à conclure environ 88% des fois après le gain de la première manche et plus de 91% des fois pour les joueuses du top 10, lorsque Ons n’a réussi à confirmer que 81% des fois. Plus précisément, elle a énormément de mal à rebondir après la perte d’un deuxième set qui l’emmène vers un troisième set. En effet, elle n’a réussi à remporter que 50% de ses 3^èmes sets suite à la perte de la seconde manche, ce qui correspond à la moyenne du top 70. En comparaison, les joueuses du top 10 s’en sortent dans plus de 72% des cas. Cela nous permet de déceler une première marge de progression, tactique et mentale, dans le jeu de la tunisienne afin d’apprendre à réagir plus rapidement à ce genre de situations. Cette statistique nous renvoie aux deux contre-performances de sa saison 2020 à Lexington et Ostrava, où elle a complètement lâché prise en milieu de deuxième set contre la jeune Coco Gauff et la Grecque Maria Sakkari.

Si aussi bien l’aspect mental que physique semblent être en cause, nous avons tenté d’aller plus loin afin de trouver des éléments de réponse dans la durée de ses matchs. En moyenne, les matchs de Ons Jabeur auront duré 1h31 contre 1h37 en moyenne sur le circuit. Lorsqu’on analyse cela de plus près on se rend compte que la tunisienne est plus à l’aise dans les matchs courts que la grande majorité des joueuses du circuit avec 82% de matchs remportés contre 74% en moyenne pour les joueuses du top 10. En revanche, sur les matchs qui dépassent 1h37, elle n’a réussi à en remporter que 46%, contre 62% pour les joueuses du top 30 et 72% pour le top 10. Lorsqu’un match dépasse les 2h de jeu, Ons Jabeur arrive à trouver les ressources avec 5 matchs remportés sur les 7 joués en plus de 2h. Il s’agit donc des matchs qui se jouent entre 1h30 et 2h que la tunisienne a le plus de mal à gérer, avec 36% seulement de matchs remportés contre 66% pour les joueuses du top 20. Réussir à trouver de la fraîcheur physique sur ces longueurs de matchs semble primordial, surtout lorsque l’on sait que les rencontres entre joueuses du top 20 durent en moyenne 1h45. 

Régularité au service et gestion des points importants, deux axes de travail pour la suite

Intéressons-nous maintenant aux statistiques de Ons au service. Elle a remporté en moyenne 60% des points sur son service, un pourcentage qui se situe dans la moyenne du top 30. Elle a notamment remporté 68% de points en moyenne par match derrière sa première ce qui est supérieur à la moyenne des joueuses du top 30. Sa régularité au service est par contre un élément sur lequel du travail doit encore être effectué, avec un pourcentage de premières balles, qui se situe à 52% sur la saison contre plus de 62% en moyenne sur le circuit. En revanche, derrière sa deuxième balle, elle réussit à gagner plus de 52% de ses points, ce qui est dans la moyenne des joueuses du top 10. 

Quand on s’intéresse maintenant aux points décisifs, qui en disent long le mental d’une joueuse, on remarque que la tunisienne a beaucoup de mal défendre les balles de break. En effet, alors qu’elle gagne 60% de ses points au service, elle n’arrive à sauver que 51% de balles de break en moyenne (59% pour le top 20). Lorsqu’on compare justement le pourcentage de points gagnés sur le service et le pourcentage de balles de break sauvées sur un même match, ou en d’autres termes la capacité d’une joueuse à maintenir ou même élever son niveau de jeu au service lors des points importants, Ons chute de pratiquement 8% en moyenne et fait figure de mauvaise élève dans le top 100 mondial. En effet, le top 30 subit une baisse d’environ 3% en moyenne contre quasiment 0% pour les joueuses du top 10, qui arrivent à maintenir leur niveau de jeu moyen au service sur un match lorsqu’elles sont amenées à défendre une balle de break. Sur ce point bien particulier Venus Williams, Danielle Rose Collins et Iga Swiatek ont réussi à remporter en moyenne 6% de point en plus sur balles de break que sur le reste de leurs points de service par match, ce qui dénote d’une capacité mentale hors norme à élever leur niveau de jeu sur des points cruciaux. En revanche, Ons réussit à concrétiser plus de 50% de ses occasions de break ce qui correspond la moyenne du top 10. Lors de ces temps forts, elle arrive en moyenne par match à augmenter son pourcentage de points gagnés de 4% par rapport à son pourcentage de points gagnés en retour sur le reste du match. Ce pourcentage est très encourageant car il est légèrement supérieur à ce que font les joueuses du top 10. 

Un autre élément sur lequel elle a encore une marge de progression est le tie-break. Ons a en effet gagné 6 tie-breaks sur 12 joués, soit une moyenne de 50% que l’on peut qualifier de faible comparée à la moyenne du top 30 ou encore du top 10 qui se situent respectivement à 60% et 63%. 

La course au premier titre, un objectif absolu !

Pour finir, il se doit de mentionner une statistique qui fait encore tache dans la carrière de la tunisienne et à laquelle il va falloir absolument remédier cette année, à savoir le fait qu’elle soit la seule joueuse du top 40 mondial à n’avoir jamais remporté un tournoi WTA de sa carrière. Il serait logique que cela soit l’objectif principal de la saison à venir, ce qui implique d’enchaîner les performances sur une semaine entière, ce qu’elle n’a encore pratiquement jamais réussi à faire. Lors de sa dernière conférence de presse, elle a évoqué ses objectifs pour la saison en parlant notamment d’intégrer le top 10. Comme nous l’avons mentionné plus haut, si ses performances la place aisément dans le top 20, la barre des dix meilleures joueuses du monde semble encore un peu haute. Pour y arriver, il faut commencer par se concentrer sur la première étape que constitue un titre dans un tournoi WTA, une condition sine qua non pour atteindre ce fameux top 10. Il est pour cela nécessaire de gommer les quelques imperfections qui ressortent des statistiques de sa saison. En effet, une augmentation d’environ 8 points de son pourcentage de premières balles (pour atteindre les 60%) semble tout d’abord nécessaire, en se concentrant sur les points importants et en particulier les balles de break qu’elle sera amenée à défendre. Il faudra ensuite réussir à mieux gérer les matchs mi-longs, à savoir la fourchette 1h30-2h, en se concentrant particulièrement sur sa remobilisation physique, tactique et mentale lorsqu’elle perd son deuxième set. Les points importants dans leur ensemble, surtout lorsqu’elle est dos au mur, constituent un axe de travail, en se concentrant comme nous l’avons dit sur les balles de break à défendre, mais aussi sur les tie-breaks. Un autre élément clé dans la course à ce premier titre peut aussi résider dans la planification de sa saison et le choix des tournois à disputer. En effet, il pourrait être judicieux de se tourner vers des tournois de catégorie inférieure afin de se donner plus de chance d’obtenir ce premier sacre et d’engranger des points, mais surtout de la confiance.

2021, rêvons plus grand ?

En conclusion, la saison de Ons Jabeur a été exceptionnelle sur le plan comptable avec un saut de plus de 50 places au classement pour atteindre la 31^ème place mondiale, ce qui lui assure par exemple d’être tête de série à l’Open d’Australie 2021. Ces performances vont faire en sorte qu’elle soit de plus en plus indépendante financièrement, entre prize money et sponsoring, avec notamment de nouveaux partenariats avec Qatar Airways et Tunisie Telecom. Cela va lui permettre, entre autres, de renforcer son équipe et sa préparation. Un travail mental, physique et tactique est nécessaire afin de se donner les moyens de ses ambitions et de son talent monumental, en incorporant par exemple une composante statistique à sa préparation. Une chose est sure, Ons Jabeur a non seulement clairement sa place dans le top 20, mais sa marge de progression est également encore très importante, ce qui nous donne le droit de rêver pour les saisons à venir… YALLA !

Un travail de Mhamed Ben Salah