L’entraîneur de l'Espérance Sportive de Tunis, Mouine Châabani, a remporté hier sa deuxième Super Coupe de Tunisie d'affilée, faisant de lui le premier technicien à réaliser cette performance.. Portrait d'un coach qui n'a pas le temps de souffler...
Mouine Chaâbani (39 ans) fêtera le 10 octobre prochain sa deuxième année à la tête de son club formateur et l’une des plus grandes formations du continent africain : L‘Espérance Sportive de Tunis. Après une première expérience prometteuse à la tête du CS Hammem-Lif, il débarque au Parc Hassen Belkhouja en tant qu’entraîneur adjoint, où il opère aux cotés d’Amar Souayah, Faouzi Benzarti et Khaled Ben Yahia : de grands noms du football tunisien qui ont permis au natif de Béja d’acquérir de l’expérience, avant de pouvoir saisir sa chance à la tête de l’équipe première dans des circonstances épiques (départ Ben Yahia juste avant la demi-finale retour de la CAF CL contre les angolais du Primeiro de Agosto) .
Mais depuis qu’il est à la tête de l’équipe première du « Tarajj », on entend tout et son contraire sur Chaâbani : pour certains, c’est le meilleur entraîneur en Tunisie actuellement (de par les titres glanés), alors que pour d’autres il apporte tactiquement peu à une équipe qui a raté quelques marches à sa portée . Mais que reprochent au juste les supporters de l’Espérance à leur technicien ?
Un palmarès déjà très fourni..
Malgré son manque d’expérience à la tête d’un grand club, le jeune coach Mouine Chaâbani (une carrière de 10 ans comme défenseur chez les A des Sang & Or) réussit de grands débuts et remporte la CAF Champions League en battant Al Ahly d’Egypte après un match retour qui restera dans les annales du football africain (Victoire 3-0 à Rades après une défaite 1-3 au Caire). Il enchaîne ensuite avec le titre de champion de Tunisie en Juin 2019, juste devant l’Etoile du Sahel, et une deuxième victoire personnelle en CAF CL, cette fois, face aux marocains du Wydad après une finale électrique (Victoire validée récemment par le TAS). Une performance exceptionnelle pour l’Espérance de Tunis qui a conservé son titre continental assorti d’un record africain en termes de nombre de matchs sans défaite..
La saison 2019-2020, qui fut très particulière au vu du contexte sanitaire, n’a pas empêché Mouine Chaabani de réaliser un sans faute sur le plan national, avec le 30e titre de champion de Tunisie de l’histoire du club, ainsi qu’une deuxième Super Coupe d’affilée face au CS Sfaxien… Un bilan très positif pour le jeune technicien, qui a encore l’occasion d’aller chercher le triplé cette saison (l’EST disputera ce mercredi la demi finale de Coupe de Tunisie face au CS Chebba). Avec deux CAF CL, deux titres de champion de Tunisie et deux Super Coupes en deux ans, le palmarès de Châabani est déjà très enviable..
Un pragmatisme qui cache des carences tactiques ?
On le sait, dans les grands clubs, l’exigence des supporters est toujours élevée et il faut vite imposer une philosophie de jeu et développer les joueurs et l’équipe. Malgré une première saison très séduisante, où l’Espérance de Tunis a proposé du bon contenu, alliant performance et beau jeu (avec notamment des matchs références à Sfax en championnat (0-2) et à Casa contre le Raja en CAF CL (0-2 également) , la deuxième saison semble plus compliquée pour Mouine Chaâbani qui, depuis la reprise du championnat, a montré une certaine inflexibilité dans ses choix (un 4-3-3 peu évolutif), et n’a pas toujours su tirer le meilleur de ses nouveaux atouts offensifs..
C’est surtout la triple confrontation face au Zamalek, qui a montré certaines limites tactiques du technicien tunisien dont la côte a beaucoup baissé auprès d’une partie des supporteurs de l’EST qui estiment que bien qu’il ait fait de son mieux, Chaâbani n’a pas le profil pour développer le club et dominer de nouveau sur le plan continental.. surtout au vu de l’effectif très riche et des investissements consentis par le président Hamdi Meddeb.
Les reproches envers Chaâbani sont-ils justifiés ?
Pour évaluer un entraîneur, il faut tenir compte de plusieurs paramètres (dont certains faisant défaut en Tunisie pour manque de data) mais, in fine, cette évaluation est d’abord mise en perspective de l’objectif qui est fixé par le club. À l’Espérance, il faut des titres et du spectacle. Mouine Chaâbani est un entraîneur qui a réussi à s’adapter à beaucoup de situations, doublé d’un bon communicateur qui connaît parfaitement la culture du club dont il était capitaine. Malgré certaines carences tactiques, il s’en sort souvent très bien. Nous pouvons lui reprocher beaucoup de choses sur sa lecture du jeu, son coaching, sa relation avec certains joueurs du club, mais il a tout de même réussi à inculquer un état d’esprit conquérant (la gagne) à son groupe au détriment parfois de la manière.. et les récents titres lui donnent raison.
Le débat reste ouvert, entre exigence et pragmatisme, tout dépend où l’on met le curseur…